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L’écriture de Leïla Slimani a tout de la force tranquille. Puissante,
infatigable,
et discrète à la fois.
Elle est en fait toute à l’image de son autrice : flamboyante sans jamais en faire trop.
Terriblement intelligente et terrifiante de précision.
Ce deuxième volet de la trilogie du Pays des autres ne pouvait être différent. Comme la première fois, et malgré les deux ans qui s’étaient écoulés depuis ma lecture du premier tome, j’ai été emportée.
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Maroc, 1968 : tandis que Mathilde s’occupait de son foyer, Amine est parvenu à faire de son domaine aride une entreprise florissante. Ils appartiennent désormais à une bourgeoisie qui prospère, fait la fête et croit en des lendemains heureux. Mais le retour de leur fille, Aïcha, partie étudier en France, fait voler en éclat le glacis d’apparence qui figeait cette famille. Le modèle d’émancipation qu’ils croyaient incarner depuis d’indépendance n’est-il qu’une illusion?
*
Raconter l’histoire de sa famille sur trois générations (avec quelques nuages de fiction survolant le tout), là était l’ambition de Leïla Slimani. Le premier volet m’avait ravie, et alors que le troisième était déjà sur toutes la tables en librairie, je réalisais que j’avais omis de faire mien le deuxième.
Et si je me méfie des séries romanesques (que je ne parviens jamais à suivre, tant mon coeur ne cesse de m’appeler vers d’autres curiosités), c’est avec un immense plaisir que j’ai retrouvé Mathilde, Amine, Mourad, Selma, Aïcha et Selim. Je n’ai eu aucune difficulté à « raccrocher les wagons » et me suis coulée dans ce Maroc des années 60 avec passion.
J’admire la capacité de Leïla Slimani à donner corps aux ambiances. Elle parvient, en quelques phrases à peine, à nous plonger, tête la première, dans une réalité passée. Tout sonne juste, vrai, désespérément fidèle. On ressent dans notre chair les foudres de la déception, des occasions manquées et des rêves qui s’écroulent, on s’émerveille des amours naissants et des passions subites, on se sent grandi.e.s d’avoir partagé un peu de cette histoire sonnante et trébuchante.
Et quelle précision! Avec quel naturel Leïla Slimani se charge de la narration!
Dans une langue mise au service du récit, puissante et mystérieuse à la fois.
Jamais l’autrice ne se regarde écrire. Elle se contente de dire,
et ce, magnifiquement.
Et cette fois, je me suis empressée de commencer le troisième tome immédiatement après avoir terminé Regardez-nous danser, assez peu désireuse de quitter, une fois de plus, ces personnages dont j’aime infiniment partager la vie.
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